Cette fiche fait partie d'un ensemble d'outils pour aller vers la démocratie.
Il ne s'agit pas d'entrer dans le débat - qui existe depuis l'extension
d'Internet au grand public - de savoir si Internet est un outil utile pour la
démocratie ou s'il est un outil de contrôle et de diversion. Il
est bien entendu tout cela à la fois. Tout dépend des usages qu'on
en fait.
Nous nous intéresseront plus particulièrement aux effets psycho-sociologiques
de ses usages.
Internet permet à des individus ou à des organisations disposant
de peu de moyens, de mettre à disposition des informations accessibles
à tous ceux qui ont accès au réseau Internet (a minima
: dans une bibliothèque publique). En cela l'outil donne le pouvoir de
publication à ceux qui en était réduit à imprimer
des tracts avec les moyens du bord. Cela permet donc de limiter les effets du
pouvoir de l'argent sur la monopolisation des moyens d'information.
Naturellement ces informations alternatives sont noyées dans la masse
des informations conformes, qui, à l'image de la société,
dominent la toile. C'est ici que les liens entre les sites militants jouent
leur rôle essentiel : celui de tisser un réseau alternatif et d'orienter
les internautes vers les sources d'informations alternatives.
Notre site compte fin 2009 près de 750 liens externes, disséminés dans nos pages ou - pour certains - regroupés dans les pages de liens.
De plus le courrier électronique permet l'échange et la diffusion d'informations quasiment en temps réel à une grande quantité de personnes. Une attention particulière doit être portée à la mise en valeur d'informations importantes ou urgentes, qui autrement peuvent là aussi se trouver noyées dans la masse. De plus nous vous invitons à prendre l'habitude de chiffrer systématiquement vos messages pour échapper à la surveillance (voir ci-dessous §3).
Internet peut donc être un outil qui facilite le travail militant. Mais Internet ne transforme pas les gens en militants...
La question de la liberté d'expression sur Internet est cruciale, les autres médias de grande diffusion étant déjà quasiment tous sous contrôle. Or il n'y a pas qu'en Chine que cette liberté est menacée, le gouvernement français tente actuellement (été-automne 2009) de faire passer des lois de censure et de surveillance aux conséquences gravissimes : mobilisez-vous sans perdre de temps ! (Voir plus bas.)
Internet est un moyen de diffuser largement (notamment auprès des gens
qui lisent peu de livres) les savoirs-faire nécessaires à l'émancipation
et à l'autonomie vis-à-vis des oligarques monopolisant les
connaissances et moyens de production. Plus généralement lire
notre page : Connaissance
et pouvoir : les savoirs-faire, enjeu de la démocratie.
Il permet surtout l'échange d'expérience dans des forums de discussion
(tel que On
peut le faire) et le travail collaboratif sur des projets (par exemple
le
développement de logiciels libres).
Mais, revers de la médaille, ceci crée une dépendance vis-à-vis de l'ordinateur : une technologie non maîtrisable par le commun des mortel. C'est pourquoi nous proposons une fiche pratique : gérer soi-même son équipement informatique. Lire aussi : de la démocratie en informatique, et télécharger notre dossier informatique.
Plus généralement Internet permet à de simples citoyens de proposer et de diffuser eux-mêmes des contenus, ce qui était jusqu'alors réservé aux médias disposant de moyens financiers (et quasiment tous contrôlés par les puissances de l'argent). Il y a là un potentiel démocratique, qui se trouve menacé par les atteintes à la neutralité du réseau.
C'est actuellement l'un des enjeux les plus importants en matière de
démocratie : assurer que l'acheminement des informations sur le réseau
Internet reste égal pour tous. En effet la concentration des opérateurs
a amené des rapprochement entre les fournisseurs d'accès à Internet
(FAI) et les fournisseurs de contenus. La tentation est alors grande pour ses
opérateurs de favoriser leurs propres contenus sur les réseaux
qu'ils contrôlent.
Quand aux simples citoyens, fournisseurs eux-aussi de contenu, leur parole
se trouverait alors marginalisée. La place qui leur est promise étant
celle de simples consommateurs de contenu - tels des téléspectateurs
ou des utilisateurs de minitel - d'où l'expression de "minitel
2.0" (lien vers une interview de Benjamin Bayard sur écrans.fr) introduite
pour désigner
ces projets d'évolution
du réseau Internet.
A l'inverse tout un chacun devrait pouvoir transformer
aisément son ordinateur en serveur de contenu (de messagerie, etc.).
Lorsqu'il s'est ouvert au grand public, Internet était une sorte de paradis où régnait la gratuité, le bénévolat, le partage. Bien vite les acteurs du capitalisme l'ont investi pour en faire un gigantesque hypermarché virtuel, si bien qu'aujourd'hui la partie "bénévole" est devenue marginale, même si elle continue d'exister.
Les outils libres et communautaires ne sont pas eux-mêmes à l'abri de dérivent dès lors qu'il rencontre un large succès. L'illustrent deux exemples bien connus : la base de références cinématographique The Internet Movie Database (imdb) et l'encyclopédie libre Wikipedia.
Imdb est une base de données de films renseignée par les utilisateurs (internautes) eux-mêmes. Des milliers de passionés ont bénévolement rempli cette base jusqu'à ce que, forte de centaines de milliers de titres, elle devienne la principale référence en la matière. C'est alors que ses fondateurs ont accepté l'offre de rachat de la société Amazon (géant de la vente en ligne, ayant commencé avec la vente de produits culturels, DVD vidéo en particulier). Ainsi pour une forte somme, ces fondateurs ont vendus, à une société privée, le fruit du travail communautaire qu'ils se sont approprié.
Imdb continue d'exister et de s'agrandir, mais elle s'est adaptée aux exigences commerciales de la société qui désormais la gère. Un exemple frappant : le genre "film politique" a été supprimé ! (Il n'existe pas non plus dans les rayons des grandes surfaces commercialisant des DVD...)Wikipedia est un autre exemple de base de données renseignée par les internautes. Là encore c'est la dimension collaborative qui en a fait le succès phénoménal. Devenue source de référence, Wikipedia s'est dotée d'une structure d'évaluation et de modération par les pairs, qui n'est pas sans rappeler ce qui se passe dans le milieu universitaire. Résultat : il est devenue aujourd'hui extrêment difficile d'introduire des idées non conformes à l'idéologie dominante dans l'encyclopédie : les gardiens de l'orthodoxie veillent. Lire, par exemple, la critique et le témoignage d'un contributeur de longue date : Lix.
Les moyens dont disposent les grandes organisations (multinationales, gouvernements)
leur permet de mettre en place une surveillance des contenus diffusés
sur Internet, des connexions individuelles, des recherches aux travers des
moteurs et des échanges de courriers électroniques. Ceci à
des fins commerciales (marketing) et/ou politiques.
Il existe des solutions (jamais fiables à 100%) pour rester anonyme
et protéger les communications sensibles : voir notre fiche Sécurité,
confidentialité et confort sur Internet ainsi que celle consacrée
à la confidentialité des courriels.
Les grandes organisations disposent aussi des moyens de diffuser à grande
échelle des publicités, de fausses nouvelles (désinformation)
et de nuire à des sites ciblés (actions dissuasives auprès
des hébergeurs, piratage...).
De plus, les technologies avancées (ADSL et Fibre optique) et le gigantisme
du réseau
ont réduit le nombre d'opérateurs capable d'offrir des services
efficaces. Ainsi, les fournisseurs d'accès ADSL et les moteurs de
recherches efficaces sont au main d'un petit nombre de grandes entreprises
plus ou moins
monopolistiques. Ces organisations ont donc le pouvoir matériel d'exercer
la censure sur Internet, éventuellement à la demande d'un gouvernement
(ex : Google et le gouvernement chinois).
Les associations militantes ne peuvent donc totalement se reposer sur Internet.
Solutions alternatives partielles :
L'herbergeur associatif FDN (membre de Gitoyen) fourni un accès Internet ADSL en dégroupage partiel, à prix coutant.
L'hébergeur indépendant no-log (service de l'association Globenet) fourni encore le service de connexion bas-débit (modem sur ligne téléphonique, 49 Kb/s).
L'association Imaginons un réseau Internet solidaire promeut l'Internet non marchand.
Voir une sélection de liens vers des fournisseurs de services Internet alternatifs.
La France semble vouloir dépasser la Chine dans la course aux trophées
Big Brother. Les récentes lois et les nouveaux projets de loi (été et
automne 2009) dits HADOPI 2 et LOPPSI 2 vont - s'ils voient le jour - restreindre
les libertés publiques et individuelles sur Internet au niveaux des
pires dictatures de la planètes.
Ces lois sont à l'initiative
- d'une part du lobby du divertissement (major companies (ex: Vivendi-Universal),
SACEM, SACD, etc.) qui défend
un modèle économique
obsolète, et promeut des mesures visant, surperficiellement, à lutter
contre le téléchargement
illégal - en réalité, visant à rendre les utilisateurs captifs de leurs
services ; Voir les DRM.
- et d'autre part des classes dominantes, qui se sentant aujourd'hui menacées,
veulent museler l'expression libre sur Internet (ils se justifient en disant
: "on peut écrire tout et n'importe quoi sur Internet", ce
qui constitue précisément la définition de la liberté d'expression
!).
Ainsi, prenant prétexte de lutter contre les "pirates", les "terroristes",
les "révisionnistes" et bien entendu "les
pédophiles", c'est un dispositif de surveillance et de censure
inédit qui est sur le point d'être voté, notamment :
- installation obligatoire sur chaque ordinateur connecté à Internet
d'un logiciel de filtrage ;
- possibilité pour la police d'introduire à distance des logiciels
espions sur les ordinateurs individuels ;
- accès rendu impossible, par un filtrage au niveau des fournisseurs
d'accès Internet (FAI), à une liste de sites désignés
par le Ministère de l'Intérieur (la police) de façon arbitraire
et opaque, sans aucune décision de justice.
Ces textes portent également atteinte à l'usage des logiciels libres.
Pour en savoir plus et agir de façon urgente, rendez-vous
sur l'un des sites suivants :
http://www.laquadrature.net
http://www.april.org/hadopi
http://www.loppsi.fr
Finalement l'effet le plus massif d'Internet dans notre société
- particulièrement chez les jeunes - est d'orienter les internautes vers
une socialisation virtuelle. Les "réseaux sociaux" et les espaces
virtuels (type second life) sur Internet proposent de trouver des "amis"
en ligne et permettent de se donner l'illusion de militer, alors que tout ceci
n'existe que de façon virtuelle.
Le succès de ces réseaux est d'autant plus important que les relations
dans la vie réelle (in real life = IRL) sont pauvres dans cette
société individualiste qui isole les individus.
A titre d'exemple, nous avons rapporté le résultat de notre exploration du réseau Facebook sur notre forum.
Beaucoup de gens investissent donc ces espaces, au point d'y passer l'essentiel
de leur temps libre, dans la recherche illusoire de liens sociaux. Ils croient
s'y inventer une autre "personnalité", conforme aux normes
de ces espaces. Ces espaces virtuels deviennent alors le plus efficace des divertissements
(diversion) et le meilleur des contrôles (canalisation) de l'activité
de la population.
L'individu absorbé dans cette activité schyzophrénique
et illusoire est donc l'individu idéal de tout régime totalitaire puisqu'il désinvesti le monde réel ou s'exerce l'activité
politique.
Pour une analyse plus complète des enjeux de l'Internet, lire le livre (téléchargeable) de Laurent Chemla : Confessions d'un voleur.
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